UN VILLAGE D'ORIGINE MEDIEVALE,

 

                                                                                    
Saint-Martin Vésubie est un village d’origine médiévale, élevé à la confluence des vallons de Fenestres et du Boréon, sur un promontoire relique des anciens glaciers quaternaires. La cime du Piagu protège l’agglomération au nord. A l’est, la cime de La Palù, et à l’ouest le Col Saint-Martin participent à un paysage typique de montagne. Au pied du village née la Vésubie, par le mélange des eaux des deux torrents.


La Mairie :


L’arrivée sur Saint-Martin s’effectue par la place de la Mairie. Pour cela, il a fallut contourner le village, longeant les maisons anciennes, donnant l’image d’un village fortifié. La Place de la Mairie est le symbole, avec les grandes promenades ombragées, de l’annexion du Comté de Nice à la France, après 1860. Elle fut construite au plus haut de la ville, alors en pleine extension démographique et urbaine. Son style, résolument moderne, veut donner l’image d’un village accueillant. Les piliers formant les voûtes sont en granit du vallon de Salèses. Très vite autour de la nouvelle Mairie s’établirent une série d’hôtels, destinés à accueillir toujours plus de touristes. L’aristocratie anglaise et italienne prenait l’habitude de passer la période estivale à Saint-Martin, recherchant un climat plus agréable que celui de la côte. La plaque commémorative apposée sur le balcon de l’Hôtel des Alpes rappelle le passage et le séjour du président de la République Félix Faure, en 1899, quelques mois avant de rejoindre la vie Eternelle de la manière que l’on connaît (en galante compagnie). A cette époque, la route n’arrivait pas encore jusque là. Il fallait emprunter la rue centrale.

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La rue centrale et le canal :

 
Autrefois appelée Rue Droite, car elle permettait de relier du sud au nord le village, cette rue date dans sa partie supérieure du XVIIIème siècle, alors que sa partie inférieure est médiévale. Le canal central, appelé bealiera en gavot (langue locale), ou gargouille en français, date du début XVème siècle (1418). Il a été créé afin d’irriguer les champs et prés qui bordaient à cette époque les habitations. Il pouvait également servir en cas d’incendie, mais a été inefficace lors du Grand Incendie de 1470. On raconte encore qu’il servait d’égout aux habitants, et c’est sûrement vrai, puisqu’un agent municipal était chargé, au XVIIème siècle, de veiller à son entretien, et à ce que les habitants ne jettent pas leurs immondices par les fenêtres. A la fin du XVème siècle, il longeait le village au nord, et ne traversait que la portion comprise entre la Place Vieille et la Place du Palais Gubernatis, avant de ressortir de l’agglomération.


La chapelle des Pénitents blancs :


La chapelle a été bâtie au XVIIème siècle, et sans doute agrandie au siècle suivant. Elle était à cette époque à l’extérieur de la ville, selon un modèle que l’on retrouvera. Une première chapelle occupait cet espace vers le milieu du siècle. On retrouve par la suite son vocable, la Sainte Croix, associé à la présence des Pénitents blancs de notre village. Il n’existe pas à Saint-Martin de répartition sociale des confréries de pénitents, contrairement à Nice. Elles semblent plutôt répondre à une répartition spatiale, concernant les habitants du haut de la ville (in Cima del Villa). Le style de la chapelle est d’un baroque élégant mais relativement sobre. Elle est comparable à celle de la même confrérie à Utelle. Les décors principaux sont essentiellement en bois peint. Le maître-autel est surhaussée par la colonnade, soulignant la présence des deux statues (saint Eloi et saint Blaise, tous deux rappelant l’importance des muletiers à Saint-Martin, au pied du col de Fenestre), encadrant le tableau principal : « la descente de Croix ». D’un modèle connu par ailleurs, il se caractérise par la présence de 4 personnes soutenant le Christ après l’avoir détaché. L’autel renferme un Christ gisant, également en bois, qui n’est montré que lors du Vendredi Saint et de l’Ascension. Les 8 tableaux ornant les murs latéraux représentent la Passion du Christ (« La Sène, le Lavement des Pieds, Jésus bafoué devant Pilate, Jésus dépouillé de ses vêtements, le Couronnement d’épines, le Portement de la Croix, Jésus cloué sur la Croix, Mort de Jésus entre les deux larrons). Ils datent du XVIIIème ou du XIXème siècle. La légende locale rappelle que des habitants de Saint-Martin auraient servi de modèles aux peintres. Dans la chapelle est encore présente la bannière de procession de la Confrérie, ornée d’une nouvelle Pietà. La façade de la chapelle a été remaniée au milieu du siècle dernier, ajoutant l’œilleton et les corniches, des colonnades peintes, mais aussi les bas-reliefs représentant « l’invention de la Sainte Croix par sainte Hélène », une « Pietà », et « l’Empereur Constantin se convertissant sur le champ de bataille ». Le clocher se caractérise par la forme de son bulbe en cuivre « orientalisant », sans qu’il puisse s’en trouver expliqué.

 
La Place du Marché

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Arrivant sur la Place du Marché, nous abordons la limite des remparts avant le XVIIème siècle. Le village s’arrêtait là. Son ancien nom, le Portil, indique la présence d’une porte fortifié à cet endroit. Ses derniers témoins furent détruits à la fin du siècle dernier, pour éviter qu’ils ne s’effondrent. A cette époque, et avant l’annexion française, on y trouvait la Maison Commune, l’ancienne mairie, auprès de laquelle se situait le tribunal du Juge de Paix, chargé de résoudre les petites affaires de voisinage (l’ancienne basse justice), ainsi que les deux loges de la prison municipale. Cette place fut ensuite le lieu du Marché local, encore à la fin du XIXème siècle. La nécessité de procurer journellement des produits frais aux estivants demandait son installation. Amélioration importante du quotidien des habitants, il permettait l’écoulement de la production locale. Une plaque commémorative, que l’on trouve sur la façade du bâtiment méridional, rappelle que la boutique d’un commerçant local, Mr. MOTTET, se trouvait sur cette place, à l’endroit même de l’épicerie, qui a conservé le cachet ancien. A l’époque, il s’agissait d’une ferblanterie (nous en avons une photographie au Musée). C’est un personnage de première importance pour l’histoire contemporaine de notre village, puisqu’il fut à l’origine de l’électrification du village. C’est le fondateur de la première usine électrique de Saint-Martin, deuxième ville du pays à connaître ce progrès (après La Roche-sur-Foron). Mr. MOTTET conserva pendant 30 ans son exploitation, avant de la céder à la Mairie. Il fournissait également les ampoules dont avaient besoins les lampadaires, mais aussi les particuliers, puisque l’électricité était un élément important de l’image de la cité estivale

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Les maisons médiévales :


En redescendant encore la rue centrale, nous nous approchons du village médiéval. Nous y retrouvons quelques maisons d’importance. Le boutique Otto-Sports date des XV-XVIèmes siècles, avec son arche caractéristique, que nous retrouvons sur d’autres façades. Plus haut, les encorbellements de l’étage noble (le Premier) soulignent les fenêtres. Le rez-de-chaussée était destiné au commerce, les arcades permettant les échanges. Proches de ces bâtisses se trouvaient les entrepôts, mais aussi les écuries qui accueillaient les mulets. Longeant le vallon de Fenestres, les façades orientales s’ouvrent sur de grandes hauteurs. Des passages sont pratiqués, des cantoun voûtés, qui permettent de rejoindre les jardins au pied du village.
Sur la Place Vieille se retrouve le même modèle de maison de la Renaissance. Le dernier exemple que nous verrons est celui du Palais Gubernatis. Lui faisant face, la porte d’une importante demeure est datable du XVIIème siècle. Elle se rapproche beaucoup, par sa structure interne, des palais du Vieux Nice. Plus loin, dans le village, nous retrouvons des portes en ogives, ou en demi-ogives, datées également de la fin du Moyen Age. Elles sont les témoins de ce que fut vraisemblablement le village reconstruit à cette époque, après le grand incendie dont on a déjà parlé. Auparavant, les maisons comprenaient une forte proportion de matériaux légers, bois et chaumes… qui aidèrent certainement à la propagation du feu. Elles étaient alors moins hautes. Leur charpente devait également être plus légères, ne supportant que des toits en bardeaux ou chaumes.

 
La chapelle des Pénitents noirs :


Au fond de la Place Vieille se trouve la chapelle des Pénitents noirs de Saint-Martin. Elle est dédiée à Saint-Jean Baptiste, comme toutes celles de l’archiconfrérie de la Miséricorde, dont elle porte la dédicace parallèle. Les confrères revêtaient la Camisole, de couleur noire, où chacun se retrouve sur un même pied d’égalité, humble devant le Seigneur. La chapelle est sans doute le plus ancien bâtiment religieux de Saint-Martin. La tradition populaire en fait même la première église paroissiale. Elle le fut sans doute, au temps de la reconstruction du village, à la fin du XVème siècle, après la destruction de la première église, qui n’est pas celle que nous connaissons aujourd’hui, même si elle occupe le site originel. Les Pénitents noirs de Saint-Martin regroupaient, aux XVII-XVIIIème siècles, essentiellement les habitants du bas du village. Il n’y avait pas de répartition sociale entre eux. La notabilité locale se partageait dans les deux confréries. Elle formait plutôt une sorte de clientélisme.
La chapelle, sous sa forme actuelle, présente une série de remaniements successifs. Son origine médiévale ne semble pas faire de doute, du simple fait de son orientation à l’Est. Son chevet est plat. Mais la coupole centrale, élaborée à partir d’un bâtit sur bois, puis confectionnée en plâtre, est résolument moderne. L’édifice est relativement modeste, par ses dimensions comme par sa décoration. Seul le maître-autel a été baroquisé tardivement, et d’humble manière. Les colonnes torses soutiennent un ciel modeste, encadrant le tableau principal représentant la « Vierge étoilée dominant la décapitation de Saint Jean Baptiste », dont la tête est présentée à Salomée. Quelques reliques du Précurseur sont conservées dans la chapelle. La bannière des Pénitents noirs, présentant la Vierge de la Miséricorde protégeant le monde de son manteau bleu nuit, thème commun avec l’archiconfrérie niçoise. La splendeur de ce document incite au respect. L’iconographie de la chapelle est assez modeste. « Le Christ discutant avec les docteurs de la Loi au Temple » reste de facture relativement naïve, malgré les grandes dimensions de la toile. Lui fait face une « Sainte Famille, entourée de Sainte Catherine de Sienne et de Saint Charles Borromée ». La particularité de cette toile réside dans la présence du donateur, qui s’est fait représenté en priant, au pied du Christ enfant. Son habit replace le personnage à la fin du XVIIème siècle. Tout proche, un tableau représentant les deux « Saints Lazare et Pierre d’Alcantara ». Puis, en face, une « Vierge de Fenestre à l’Enfant, entourée par Sainte Anne et Saint Jean l’Evangéliste ». Il s’agit du seul tableau daté (1650) et signé (Iohan PLENT), œuvre d’un habitant du lieu. Deux dernières toiles, fortement détériorées, sont conservées dans la Sacristie. Une « Annonciation » d’assez bonne facture, sans doute du XVIIIème siècle. Puis une « Sainte Famille » où se retrouve la présence du donateur, de la même époque, si l’on considère sa taille, plus importante que sur le premier tableau. La façade de l’édifice est contemporaine, alors que le clocheton et l’œilleton datent également de la moitié du XIXème siècle. Le sol pavé donne une impression d’ancienneté, confortée par la bonne facture du bénitier. Les bancs de l’édifice sont en noyer, bois le plus noble, et datent, comme l’essentiel du décor en bois, du tout début du XIXème siècle.


Les cantons et les murailles :

 
Saint-Martin est au Moyen Age un village fortifié. Ses murailles, appelées Barri, sont élevées dès que le village se regroupe, au XIIème siècle, sur un petit périmètre, estimé à environ 3.000 m². Au XVème siècle, le village a triplé de superficie. Il reste inséré dans de puissantes murailles, qui lui ont jusqu’alors évité bien des désagréments, quand le comte de Tende venait de nuit investir le village. Au XVIème siècle encore, les habitants devaient laisser libre les passages intérieurs et extérieurs des murs, afin de permettre la défense du site. Les habitations sont resserrées à l’intérieur. Elles offrent des murs massifs aux abords de la muraille. Pour permettre l’accès, les groupes de maisons sont reliés entre eux par des passages voûtés : les cantons. Avec l’extension moderne du village vers le nord du plateau, le long du vallon de Fenestres, les fortifications sont poursuivies jusqu’à la Place du Portil, déjà rencontrée. Portiques et cantons permettent l’accès aux rives du torrent à l’Est. A partir de la Place de la Frairie s’ouvrait, et s’ouvre encore, un portique fortifié, … D’étroits chemins s’entrelacent sous les habitations aux hautes façades. A l’ouest, le besoin de protection est plus grand. La muraille est continue. Seules les extrémités permettaient les accès.

 
La porte Sainte-Anne :


L’un de ces accès subsiste encore aujourd’hui : la porte Sainte-Anne, accompagnée d’une petite portion des murailles d’antan, colonisée par l’habitat contemporain. La porte était protégée par une tour plus massive, qui en interdisait l’approche. Sa forme ogivale offre une vision plongeante sur l’extérieur. La mémoire locale raconte que cette porte, comme les autres, était fermée la nuit pour se protéger des loups. Mais on redoutait plus encore les loups à deux pattes, que la prospérité du lieu attirait. Le Barri était percé de nombreuses meurtrières, dont nous retrouvons encore quelques traces.

 
Le palais Gubernatis :

 
La porte Sainte-Anne donnait accès au palais « Gubernatis ». Venant du col Saint-Martin, et d’au-delà du Valdeblore et souvent du bas Comté, les convois de mulets reliant la Méditerranée au Piémont s’arrêtaient invariablement au village. L’entrepôt des marchandises était administré et protégé par les agents du duc de Savoie. A Saint-Martin, la famille De Gubernatis tenait cette charge. Son « palais » leur permettait de surveiller ces mouvements stratégiques. A l’origine doté de 3 arches, le « palais » est une demeure massive, datant du XVIème siècle, comme l’ensemble du quartier l’entourant. Sa situation, au pied de l’église paroissiale, s’explique par la tardiveté de son installation, mais aussi son rôle, dans la proximité des axes de communication.

 
L’église paroissiale :

 
Juchée sur une extrémité du plateau, l’église paroissiale s’impose au regard dès que l’on aborde le village. Le vaste édifice que nous connaissons aujourd’hui ne date que du XVIIème siècle. Une date reportée sur la façade, à l’angle ouest (1692) en témoigne. C’est pour elle une époque d’importants remaniements architecturaux, correspondant à un temps de prospérité pour le village. A l’intérieur se retrouve une autre preuve de ces grands changements. A proximité du chœur, la première chapelle, côté Evangile (à gauche), dédiée à la Madone du Rosaire, qui existait auparavant, a également été remaniée à cette époque : 1697. Il s’agit de la chapelle familiale de la famille De Gubernatis (voir le « Palais », au pied de l’église).
Il existait auparavant un édifice bien plus ancien, à l’origine du rassemblement du village. Cette église, dédiée à Saint-Martin, avant même que le vocable de la Madone de l’Assomption ne lui soit associé, était orienté vers l’Est, vers Jérusalem. De dimensions bien plus modestes, il ne reste aujourd’hui plus rien de ce temps. Sinon une pièce de remploie, utilisée sur l’arête nord du clocher : un départ de voûte, sommet de chapiteau, souligné par deux têtes gravées en ronde bosses, dans un style se rapprochant de l’art roman alpin. La première église de Saint-Martin fut sans doute détruite, ou du moins fortement détériorée par le grand incendie de 1470, dont la mémoire nous en a été conservée. Elle fut reconstruite plus tard, d’une dimension plus importante. Peut être exista-t-il un bâtiment intermédiaire, entre celui-ci et celui que nous connaissons, sur le modèle de l’église de Roquebillière. Le clocher lui-même, qui paraît être médiéval, révèle sa conception tardive (sans doute XVIème siècle) par le crépis qui s’étiole à sa base, révélant une structure de mauvaise facture, très étranger au parement médiéval si délicat habituellement.
Dédiée à Notre-Dame de l’Assomption, l’église, de style baroque, est un vaste édifice à nef unique, augmenté de bas-côtés massifs. L’autel principal, dédié au vocable principale de l’édifice, offre un espace massif, entouré par le chœur des chantres. L’église possède un chevet plat. Au dessus du tableau du maître-autel, une représentation de Dieu le Père, en buste, se rappelle aux fidèles. Un ensemble de tableaux complète le chœur : l’Adoration des Bergers, la Nativité de la Vierge, Notre-Dame du Mont-Carmel…
Les bas-côtés présentent l’ensemble des dévotions populaires post-tridentines que l’on retrouve habituellement dans les édifices du Comté. Se faisant face, le Rosaire, déjà rencontré, et les Ames du Purgatoire, cette dernière étant également une chapelle familiale, appartenant à la grande famille des Raiberti. La précédant immédiatement, celle anciennement dédiée à Saint François-Xavier, qui appartenait à une autre famille de la notabilité de Saint-Martin : les Cagnoli, qui ont également donné leur nom à la rue principale. En face, la chapelle de Saint Louis de Gonzague, dont le tableau central, sur le modèle de celui que l’on retrouve dans la cathédrale de Nice, dédiée à Sainte Rose de Lima. Les murs latéraux de cette chapelle sont ornés de deux parties d’un ancien retable de la fin du XVème siècle : à droite Saint Pierre et Saint Martin ; à gauche Sainte Pétronille et Saint Jean l’Evangéliste. Ces œuvres sont généralement attribuées à l’Ecole des Bréa, et l’on soupçonne Louis d’être l’auteur des visages des personnages. Les drapés, par contre, ne sont vraisemblablement pas de lui. Ces « reliques » sont les seuls éléments iconographiques connus datant du Moyen Age, et peut être de l’ancienne église paroissiale, précédant le grand incendie. Une dernière chapelle, côté Epître (à droite), dédiée à Saint Joseph, patron de la Bonne Mort. Le tableau central de l’autel est une copie d’une œuvre d’un grand peintre européen. Une seconde copie se trouve également dans la paroissiale, dans la chapelle précédente, sur le mur droit. De facture plus naïve, ce tableau devait orner une ancienne chapelle rurale, dans la partie méridionale du territoire de Saint-Martin, où se trouve actuellement le camping du même nom.
Devant la porte principale de l’édifice se trouvait encore à la fin du XVIIIème siècle le cimetière du village. Ce lieu symbolique, qui unissait les vivants à la Communauté mystique des Anciens, était le lieu, au XVIème siècle, où se tenait « traditionnellement » le Parlement Général de tous les chefs de famille du village, véritable organe législatif de la Commune. Déjà au Moyen Age, les chrétiens demandaient à être inhumés dans l’église, ou, pour les plus pauvres, au plus proche de cet espace sacré, près des reliques qui déversaient leurs bienfaits. La translation du cimetière s’effectua avant l’arrivée des troupes révolutionnaires françaises. La loi française de l’An XII de la République imposa à l’ensemble du territoire français ce que nos Anciens avaient déjà effectué sous l’administration Sarde.


La rue du Four :


Bordant au nord le village médiéval, la rue du Four, autrefois appelée Las Augieras, « les Auges » (lieu où on les fabriquait, ou encore où se trouvaient les porcs… ?). C’est sous cette dénomination qu’elle apparaît dans un document du XIVème siècle, pour être portée sur le premier plan cadastral, à la fin du XIXème siècle. Mais les habitudes de la vie quotidienne avaient sans doute changées, puisque la mémoire a conservé la dénomination de celle du Four. Il s’y trouvait effectivement les deux fours du village, qui appartenaient à la Commune depuis au moins la fin du XIVème siècle, le petit (actuellement restauré - voir sa porte) et le grand, en un temps où ils étaient les seuls autorisés. Ces fours étaient l’objet de toutes les attentions, et grèvaient largement les finances communales, qui devaient procéder à leur entretien et aux multiples réparations qu’ils occasionnaient. Le feu était l’ennemi principal du fournier, et son principal soucis. Les pierres de parement et du sol devaient être très souvent changées. Les fours étaient loués toutes les années aux enchères publiques. La personne qui l’emportait faisait généralement partie de la notabilité du village. Le fournier était son employé, recevant un salaire sur la quote part qui était traditionnellement prélevée sur les pains cuits (1 sur 30, pour des pains qui pesaient environ 1/3 de kg - fin XIXème siècle). Il fallait plusieurs heures pour faire chauffer le four. L’adjudicataire bénéficiait d’un droit d’usage de la forêt, où il pouvait prélever le bois mort et les fourrés, destinés à cet effet. Une fois à température, le fournier pratiquait la cuisson des boules de pâtes des particuliers. Le pain était principalement constitué de croûte, ce qui lui permettait de se conserver de longues semaines. Les femmes du village profitaient du four chaux pour y porter de lourds Tians, gratins de courges… et les cuisaient dans de grandes vasques de céramiques, dont certaines étaient fabriquées à Saint-Martin même, dans la poterie locale. D’autres venaient de Vallauris.

La Place de la Frairie :


Aux pieds des murailles médiévales du Castrum s’étendaient des terres cultivées, jardins et prés, qui occupaient l’espace du plateau, et descendaient ensuite jusqu’à l’actuel tennis. Protégés par le relief, et précieux aux habitants, ils permettaient la subsistance de la population, qui y plantaient leurs « herbes », ce que nous appelons aujourd’hui les légumes. Cette zone périphérique fut progressivement urbanisée, dès la fin du XVIème siècle. Dès cette époque s’y déroulaient certaines réunions du Parlement des chefs de famille du village. L’urbanisation gagna également cet espace, qui, au siècle suivant, accueillait la Maison Commune, également appelée Casa del Sant’Esprit, « Maison du Saint-Esprit ». Cette confrérie, qui réunissait ailleurs en Provence la notabilité des villages, fut à l’origine de l’appropriation par cette même Communauté des droits seigneuriaux, appelés également « banaux », et plus tard des tentatives de création d’une « République Alpine », sur le modèle réussit de la Suisse, indépendante de la Provence (XIIIème siècle). La Frairie, dont le nom rappelle la présence de cette confrérie, mais également souligne le rôle de la Communauté, souvent assimilée à une unité de foi, s’urbanisa entre le XVIIème et le XVIIIème siècle. C’est sur cette place que se réunissaient les « Jeunes » (hommes célibataires), constitués en Confrérie, sous la présidence du Biffou, maître du Carnaval, pour le banquet qui avait lieu au bas du village, à cette période de l’année. Aujourd’hui s’y tient parfois la fête des Traditions et le repas des Classes (20, 40, 60, 80, 100 ans).